MEISSA WALY DIONE, de son vrai nom Meissa Waly Mané est le père fondateur du royaume de Sine.

 

Il aurait découvert cette région après un long périple entamé depuis le royaume du Gaabou (actuelle Guinée Bissau) quitté à la suite de querelles familiales.

 

Meissa Waly Dione aurait régné 100 sur le trône du Sine, longévité qui lui a valu le nom de « Dione » signifiant en Sérère « Il est toujours là ».

 

La légende raconte que durant son long règne, il a dû faire face à de nombreuses tentatives d’assassinat toutes avortées du fait d’une protection mystique que les conjurés n’arrivaient pas à contourner. Néanmoins des comploteurs décidèrent d’utiliser sa femme Selbé Gnady qui avait pris fait et cause pour son frère contre le roi. Usant de ses atouts féminins, elle réussit à découvrir le secret du roi qui le rendait invincible : il lui confia que seul un ergot de coq sur une flèche lancée par une arbalète pourrait le tuer. Les comploteurs n’eurent plus qu’à passer à l’action.

 

Meissa Wally Dione est enterré à Mbissel dans le quartier Thiossane. Le site est entouré par un long mûr en ciment érigé dans les années 1990. En l’entrée gît un énorme baobab qui porte le nom de Meissa Waly Dione. L’intérieur est parsemé d’herbes et 5 gros baobabs longent la partie droite du mur. La tombe, elle-même, est entourée par 9 pieux de rôniers disposés en carré, dont 3 attirent l’attention car superposés chacun par une paire de cornes de bœuf.

 

Sur la tombe de Meissa Waly Dione se dresse un petit baobab sous lequel une brique en ciment et trois petits piquets de « ngaan » (celtis integrifolia) ont été disposés pour marquer l’emplacement exact de la tombe.

 

On raconte que de sa tombe, Meissa Wally peut voir tout visiteur présent sur les lieux et que même certaines personnes dotées d'un pouvoir mystique peuvent le voir dans sa tombe. Elle est tellement respectée que les visiteurs n’osent pas y entrer avec leurs chaussures.

Il semblerait aussi que le président Senghor venait se recueillir sur la tombe de Meissa Wally Dione et en repartait sans que personne ne le voit.


LES FEMMES DE N'DER Au Sénégal, l’honneur n’abdique pas ! Les femmes de N’Der sont des femmes qui se sacrifièrent, le 7 mars 1820, pour ne pas tomber entre les mains d’esclavagistes maures. 

Dans la province nommée le Waolo, située à l’embouchure du fleuve Sénégal, vivaient de paisibles cultivateurs occupés à faire du commerce avec les caravaniers transsahariens et avec Saint Louis (première capitale coloniale du Sénégal). Le fleuve séparait cette région de la Mauritanie où la tribu des Trarzas avait élu domicile.

 

Or, le traité de Djaw signé le 8 mai 1819 entre le Waalo et la France pour la colonisation de cette région allait à l’encontre des intérêts des Maures du Trarza et de leurs alliés les Toucouleur (groupe ethnique de langue peule vivant dans la vallée du fleuve, en Mauritanie, au Burkina Faso et au Mali) qui se trouvaient dans le commerce de la gomme et des esclaves et qui voulaient aussi imposer l’islam aux habitants du Waalo principalement animistes.

 

Après les violents affrontements, les principaux dignitaires du Royaume s’installèrent à St Louis notamment pour soigner le roi blessé lors d’une attaque survenue le 21 septembre 1819. 

 

Le 7 mars 1820, alors que les hommes avaient délaissé N'der pour travailler aux champs, une femme annonça l’arrivée imminente des Maures et toutes savaient ce que cela signifiait.

 

Aussi décidèrent-elles d’organiser la résistance. Elles se déguisèrent en homme et armées de coupe-coupe, lances, gourdins, fusils, se battirent avec l’énergie du désespoir. Dans un premier temps, les assaillants, surpris de la riposte, reculèrent. Ils n'entendaient toutefois pas se laisser humilier par des femmes mais ne voulaient pas non plus « abimer » la marchandise. 

 

Les femmes à bout de force savaient qu'elles ne pourraient résister longtemps à une nouvelle attaque. C’est alors que Mbarka Dia, la confidente de la reine Faty Yamar cria à ses compagnes « Femmes de Nder ! Redressez-vous et renouez vos pagnes ! Préparons-nous à mourir ! Devons-nous toujours reculer devant les envahisseurs ? Nos hommes sont loin, ils n’entendent pas nos cris. Nos enfants sont en sûreté. Allah le tout puissant saura les préserver. Mais nous, pauvres femmes, que pouvons-nous contre ces ennemis sans pitié qui ne tarderont pas à reprendre l’attaque ? Où pourrions-nous nous cacher sans qu’ils nous découvrent ? Nous serons capturées comme le furent nos mères et nos grands-mères avant nous et vendues comme esclaves. Est-ce là un sort digne de nous ? Préférez-vous qu’on dise de vous plus tard : vos grands-mères ont quitté le village comme captives ? Ou bien : vos aïeules ont été braves jusqu’à la mort ! Nous devons mourir en femmes libres, et non vivre en esclaves. Que celles qui sont d’accord entrent dans la grande case du conseil des Sages. Nous y mettrons le feu et la fumée de nos cendres accueillera nos ennemis. Debout mes sœurs ! Puisqu’il n’y a d’autre issue, mourons en dignes femmes du Walo !" Ainsi périrent elles.

 

Ce fait particulièrement tragique est resté longtemps dans la mémoire des Sénégalais. Aujourd'hui le village de N'Der est à l'abandon et à l'effacement de la nature comme de la mémoire.


Cheikh AHMADOU BAMBA MBACKE dit KHADIMOUL RASSOUL (serviteur du Prophète") ou Serigne Touba (chef fondateur de Touba) est né en 1853 à Mbacké. Il meurt le 19 juillet 1927 à Djourbel au Sénégal. Il est l’une des figures les plus importantes de l'islam de la région en qualité de fondateur de la confrérie des Mourides.

Ahmadou Bamba est un musulman soufi, ascétique (discipline volontaire du corps et de l'esprit cherchant à tendre vers une perfection par une forme de renoncement ou d’abnégation) qui écrivait sur le 

-     Le Tawhid : expression du dogme fondamental de l’islam, le monothéisme, croyance en un Dieu unique, premier pilier de la foi musulmane

-     Le figh : interprétation temporelle des règles de la charia 

-     Le tassawouf : cœur spirituel de la tradition islamique

-     La grammaire

Il est également l'auteur de nombreuses fatwas (avis juridique religieux donné par un spécialiste de la loi islamique (un mufti) portant notamment sur la théologie islamique et la récitation du coran pour régler un problème sur lequel la jurisprudence islamique n'est pas claire. Une fatwa n'est pas forcément une condamnation).

Il prêche la paix et promet le salut à ses disciples qui se conformeront à ses recommandations qui sont celles de Dieu et de son prophète dans l'islam. Il fonde la ville de Touba, cité de ses rêves, au Sénégal en 1886. Cette cité de la paix sera vouée à l’enseignement du Coran et à l’application de la tradition du Prophète, loin des attaques et des critiques des hommes.

Elle est le grand temple d’Allah dans cette partie du monde.

Son emprise sur les populations allant grandissant, le pouvoir colonial prend peur et le fait emprisonner à Saint-Louis, avant de l'envoyer en exil, en 1895, au Gabon. L'administration coloniale justifie alors sa décision en affirmant : «Il ne ressort clairement du rapport que l'on a pu relever contre Ahmadou Bamba aucun fait de prédication de guerre sainte, mais son attitude, ses agissements, et surtout ceux de ses principaux élèves sont en tous points suspects.»

Après plus de 7 ans d’exil, il rentre à Dakar en 1902 et est acclamé par la foule. L'administration coloniale tente à nouveau de l'arrêter, en envoyant des tirailleurs (corps de militaires sénégalais appartenant aux troupes coloniales) et des spahis (corps de prestige de cavalerie traditionnelle d'inspiration ottomane, intégré à l’armée d’Afrique dépendant de l’armée de terre française) mais ses disciples le protègent. Il est finalement arrêté en 1903 et amené pendant quatre ans en Mauritanie.

Après 1910, les autorités françaises réalisent que cheikh Ahmadou Bamba ne désire pas la guerre. Dès lors, puisque sa doctrine les sert, elles décident de collaborer avec lui. Serigne Touba, finalement reconnu comme un homme saint par les autorités française, refusera la Légion d’honneur souhaitant démontrer à nouveau que son action n’est inspirée que par Dieu et Dieu seul, et non pas par les hommes, amis ou ennemis.

Son mouvement prend de l'ampleur en 1926 lors de la construction de la Grande Mosquée de Touba où il sera inhumé en 1927. Après sa mort la Confrérie des Mourides  est dirigée par ses héritiers, avec une absolue autorité sur ses disciples,.

Son mausolée est un lieu de pèlerinage. Il attire des hommes et des femmes de toutes les races et de tous les continents.


IBRAHIM FRANTZ FANON, est né dans une famille métissée le 20 juillet 1925 à Fort-de-France en Martinique. Il a été un psychiatre et essayiste français fortement impliqué dans la lutte pour l'indépendance de l'Algérie et dans un combat international dressant une solidarité entre « frères » opprimés.

Il est l'un des fondateurs du courant de pensée tiers-mondiste. Il cherche à analyser les conséquences psychologiques de la colonisation à la fois sur le colon et sur le colonisé. Dans ses livres, il analyse le processus de décolonisation sous les angles sociologiques, philosophiques et psychiatriques. Il a également écrit des articles importants dans sa discipline, la psychiatrie.

Durant la première partie de sa vie, il reçoit une instruction au lycée Victor-Schoelcher de Fort de France où Aimé Césaire enseigne. A 18 ans, en 1943, il s’engage dans l'Armée française de la Libération après le ralliement des Antilles françaises au général de Gaulle. Il explique ce choix par le fait que « chaque fois que la liberté et la dignité de l’homme sont en question, nous sommes tous concernés, Blancs, Noirs ou jaunes ».

Combattant sous les ordres du général de Lattre de Tassigny, il est blessé dans les Vosges. Parti se battre pour un idéal, il est confronté à «la discrimination ethnique, à des nationalismes au petit pied ». Il est ensuite envoyé quelques semaines en Algérie, qui sont pour lui l'occasion d'observer la structure de la société coloniale qu'il conçoit comme « pyramidale » (colons riches, petits-blancs, juifs, indigènes évolués, masse du peuple) et intrinsèquement raciste.

Il devient médecin-chef d'une division de l'hôpital psychiatrique de Blida-Joinville en Algérie en 1953. Il y introduit des méthodes modernes de « sociothérapie » ou « psychothérapie institutionnelle », qu'il adapte à la culture des patients musulmans algériens ; travail qui fera l’objet de la thèse de son élève, le futur psychiatre et psychanalyste Jacques Azoulay.

En 1954, au début de la Guerre d’Algérie, il s’engage auprès de la résistance nationaliste et noue des contacts avec certains officiers de l'Armée de libération nationale et avec la direction politique du FLN à Tunis avec lequel il collabore à l'organe central de presse, El Moudjahid comme spécialiste des problèmes de torture parce qu'il avait soigné plusieurs tortionnaires en tant que psychiatre à l'hôpital de Blida. Il remet au gouverneur Robert Lacoste sa lettre de démission dans laquelle il critique vivement la colonisation française en Algérie, lettre qui lui vaudra d’être expulsé d’Algérie en janvier 1957.

En 1959, il fait partie de la délégation algérienne au congrès panafricain d'Accra ; il publie la même année L'An V de la révolution algérienne. En mars 1960, il est nommé ambassadeur du Gouvernement provisoire de la république algérienne au Ghana. Il échappe à plusieurs attentats au Maroc et en Italie.

Il entame à la même époque l'étude du Coran, sans pour autant se convertir.

Durant cette période, il continue ses travaux avec ses internes en explorant les mythes et rites traditionnels de la culture algérienne. Mais sa volonté de désaliénation et décolonisation du milieu psychiatrique algérien s'oppose aux thèses de l'École algérienne de psychiatrie d'Antoine Porot qui écrit : « Hâbleur, menteur, voleur et fainéant, le Nord-Africain musulman se définit comme un débile hystérique, sujet, de surcroît, à des impulsions homicides imprévisibles ». « L’indigène nord-africain, dont le cortex cérébral est peu évolué, est un être primitif dont la vie essentiellement végétative et instinctive est surtout réglée par le diencéphale ». « L’Algérien n’a pas de cortex, ou, pour être plus précis, il est dominé, comme chez les vertébrés inférieurs, par l’activité du diencéphale ».

Pour Fanon, c'est bien plutôt la colonisation qui entraîne une dépersonnalisation, qui fait de l'homme colonisé un être « infantilisé, opprimé, rejeté, déshumanisé, acculturé, aliéné », propre à être pris en charge par l'autorité colonisatrice. Il précise : « La première chose que l’indigène apprend, c’est à rester à sa place, à ne pas dépasser les limites ; c’est pourquoi les rêves de l’indigène sont des rêves musculaires, des rêves d’action, des rêves agressifs. Je rêve que je saute, que je nage, que je cours. Je rêve que j’éclate de rire, que je franchis le fleuve d’une enjambée. Pendant la colonisation, le colonisé n’arrête pas de se libérer entre neuf heures du soir et six heures du matin. Cette agressivité sédimentée dans ses muscles, le colonisé va d’abord la manifester contre les siens. C’est la période où les nègres se bouffent entre eux et où les policiers, les juges d’instruction ne savent plus où donner de la tête devant l’étonnante criminalité nord-africaine. »

Très critique sur les dirigeants africains ralliés à la Communauté française, il s’interroge sur les causes de l’attitude des bourgeoisies nationales devant le système colonial.

Selon lui, le colonialisme façonne au sein de la société indigène une classe de nature bourgeoise en raison de ses privilèges matériels mais qui n'aurait aucun rôle économique (pas de "capitaines d'industrie") et serait confinée à des activités de types intermédiaires. Elle se trouve dès lors uniquement dédiée à la défense des intérêts du colonialisme. Pour lui, la décolonisation ne serait effective dans ces pays que sur le plan culturel (retour aux anciennes traditions) alors que le colonialisme se maintiendrait sur le plan économique.

Il considère aussi que l'indépendance nationale n'a de sens qu'en intégrant les questions sociales, qui déterminent ce qu'il nomme le « degré de réalité » de cette indépendance (accès au pain, à la terre, au pouvoir pour les classes populaires). Cette approche le conduit à associer l'indépendance au socialisme, qu'il définit comme un « régime tout entier tourné vers l'ensemble du peuple, basé sur le principe que l'homme est le bien le plus précieux ». Il milite également en faveur du panafricanisme et de l'internationalisation de la lutte algérienne.

De son expérience de noir minoritaire au sein de la société française et de ses observations en Algérie, il rédige Peau noire, masques blancs, dénonciation du racisme et de la « colonisation linguistique » dont il est l'une des victimes en Martinique. Ce livre est mal perçu à sa publication en 1952. Frantz Fanon évoquera à de multiples reprises le racisme dont il se sent victime dans les milieux intellectuels parisiens, affirmant ainsi « le Sud américain est pour le nègre un doux pays à côté des cafés de Saint-Germain ».

Dès ses premiers écrits, Fanon ne cesse de se référer au philosophe Jean-Paul Sartre qu’il rencontre à Rome en 1961. Sartre est séduit et bouleversé par cet homme. L’admiration est réciproque.

Atteint d'une leucémie, il meurt le 6 décembre 1961 à l'âge de 36 ans, quelques mois avant l'indépendance algérienne. Dans une lettre il demandera que sa dépouille reste en Algérie. Son corps sera inhumé par Chadli Bendjedid, futur président algérien, dans le cimetière de Sifana. En 1965 il sera transféré au cimetière des « Chouhadas », cimetière des martyrs de la guerre, près de la frontière algéro-tunisienne.

IBRAHIM FRANTZ FANON a eu deux enfants : Olivier, né en 1955, et Mireille, qui épousera Bernard Mendès France (fils de Pierre Mendès France).